Vente immobilière et mobilière : les enjeux de la garantie d'éviction pour sécuriser les transactions

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16/12/2025
Civil - Civil, Personnes et familles, Bien et patrimoine

Lors de l’acquisition d’un bien, l’acheteur s’attend légitimement à en disposer de manière exclusive et sereine. Pourtant, des difficultés juridiques peuvent apparaître après la conclusion de la vente. La garantie d’éviction, prévue par le droit français, constitue une protection fondamentale pour l'acquéreur. Elle oblige le vendeur à assurer une possession paisible du bien et à le protéger contre toute contestation de ses droits.

Le cadre légal repose principalement sur l’article 1626 du Code civil. Ce texte dispose que, même sans clause spécifique dans le contrat, le vendeur est tenu de garantir l'acheteur contre l'éviction qu'il pourrait subir dans la totalité ou une partie du bien. Cette obligation couvre également les charges qui pèsent sur l'objet de la vente et qui n'ont pas été déclarées au moment de la transaction.

La protection contre les actes personnels du vendeur

La garantie d'éviction s'applique d'abord aux actions du vendeur lui-même. On parle alors de garantie du fait personnel. Le vendeur a l'interdiction formelle de poser des actes qui viendraient troubler la jouissance de l'acheteur. Ce trouble peut être matériel ou juridique. Par exemple, un ancien propriétaire ne peut pas revendiquer un droit d'usage qu'il aurait omis de mentionner.

Il est crucial de noter que cette protection est d’ordre public. En conséquence, toute clause contractuelle visant à exonérer le vendeur de sa responsabilité pour son fait personnel est frappée de nullité. L'acheteur bénéficie ainsi d'une sécurité juridique que le contrat ne peut pas lui retirer. Le principe demeure simple : celui qui doit garantie ne peut évincer.

L'extension de la garantie aux prétentions des tiers

Le vendeur doit également répondre des troubles de droit invoqués par des tiers. Si une personne étrangère à la vente prétend avoir un droit de propriété ou une servitude sur le bien, le vendeur doit intervenir. Cette obligation de transparence est rigoureusement contrôlée par la jurisprudence française.

À cet égard, un arrêt récent de la Cour de cassation en date du 13 février 2025 (Civ. 3e, n° 23-17.636) a apporté une précision importante. À défaut de clause contraire, le vendeur est responsable des charges non déclarées qui affectent le bien. Cela concerne particulièrement les servitudes non apparentes qui n'ont pas été révélées lors de la vente. Cette décision renforce l'obligation d'information du vendeur, qui doit signaler toute contrainte juridique limitant l'usage du bien.

Les sanctions et les recours ouverts à l'acheteur

En cas de manquement à cette obligation, le droit français prévoit plusieurs sanctions selon la gravité de la situation. Si l'éviction est totale ou partielle, l'acheteur peut obtenir la restitution du prix de vente. Il peut également prétendre au remboursement des frais occasionnés par le contrat et à l'octroi de dommages-intérêts si un préjudice est démontré.

Lorsque l'éviction est d'une importance telle que l'acheteur n'aurait pas acquis le bien s'il en avait eu connaissance, il peut demander la résolution de la vente. Ce mécanisme entraîne l'annulation du contrat et le retour à la situation antérieure. Toutefois, il convient de préciser qu'aucune garantie n'est due si l'atteinte au droit de l'acheteur reste simplement éventuelle. Le trouble doit être actuel et fondé sur un droit pour ouvrir droit à réparation.


La garantie d'éviction demeure un pilier de la sécurité contractuelle en France. Elle impose une vigilance accrue aux vendeurs lors de la rédaction des actes de vente, notamment sur la révélation des charges et servitudes. Pour l'acquéreur, elle représente un recours efficace contre les omissions ou la mauvaise foi, garantissant ainsi la pérennité de son investissement immobilier ou mobilier. Une vérification systématique de l'origine de propriété et des servitudes reste la meilleure prévention contre ces litiges.